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CP Stop Cigéo : bons voeux atomiques de l’Andra sur fond d’hypocrisie, de mensonges et d’avenir imposé

A l’occasion de la présentation de ses voeux (1), lundi 23 janvier 2023, aux acteurs locaux dans la région de Bure, Patrice Torres a déroulé un projet idyllique pour les prochaines années...


 

Obtention de la Dup qui va permettre les expropriations nécessaires, de l’OIN qui contraint toutes initiatives de développement local hors Cigéo sur le territoire, et dépôt du dossier de demande d’autorisation de création (DAC) : le directeur industriel de l’Andra a partagé sa satisfaction devant un parterre de « décideurs » locaux, convaincus sans même connaitre le fond du projet, pour la plupart. Du miel pour les oreilles de ces acteurs locaux qui ont depuis longtemps cédé aux sirènes de l’agence, tout en prenant en otage une population désinformée. Promesses d’emplois, prolongation des millions d’euros faciles déversés pendant des années et assurance que « nous écouterons les attentes et avis exprimés par le territoire », tout semble parfait.

Pourtant, l'Andra annonce la couleur : elle ne s'engage pas sur une sûreté totale et cela conforte les craintes des habitant-es

Selon elle, l’impact radiologique de Cigéo serait « très faible, y compris en situations accidentelles les plus sévères », il est donc admis. Ou encore côté descente des colis, « des dispositifs ont été définis pour limiter les risques ». La question des déchets bitumés n’est pas réglée : elle est reportée à après la phase-pilote : il s’agirait juste de mettre quelques mètres de béton en plus pour contenir un éventuel incendie souterrain...
La population a-t-elle bien saisi qu’une marge d’inconnues majeures est indissociable du projet Cigéo et que cela lui est imposé ?
Une thèse commandée par l’Andra a précisément démontré en 2017 qu’il était impossible de prouver la sûreté de Cigéo ! La thèse de Lény Patinaux (2) est une recherche scientifique. Il explique : « À partir des années 2000, l’impossibilité épistémique d’apporter une preuve de la sûreté d’un stockage est reconnue par l’Andra. »
« La démonstration de sûreté de Cigéo ne s’apprécie pas en fonction de sa justesse, mais de sa capacité à convaincre ses évaluateurs [...] Lorsque l’Agence doit produire une analyse de sûreté globale, l’arrangement des savoirs produits en un ensemble cohérent montre néanmoins un certain bricolage. »

L'Andra n'a pas de baguette magique, et ce n'est pas parce que la DAC est déposée que tout est résolu

L’agence avoue à mi-mots l’impuissance de l’être humain à contenir l’effroyable potentiel radioactif qui serait enfoui à 500m sous terre. Une fois fermé, c’est la géologie et la géologie seule qui sera mise à contribution. Ce qui semble bien inquiétant au regard des risques inouis du projet. Pour l’Andra, la radioactivité mettrait plusieurs centaines de milliers d’années à remonter à la surface terrestre. Des expertises indépendantes prouvent le contraire, ce que l’opposition à Cigéo clame depuis des années. 
Sur le plan éthique, peut-on accepter de dissimuler cette radio-activité dans le sous-sol, comme les générations précédentes l’ont fait en les jetant dans la mer ? Sur notre planète, tout refait sans cesse surface... Et comment prévenir la curiosité des générations futures qui pourraient ouvrir un jour futur les galeries oubliées, bourrées de déchets radioactifs ?

 

Un nouveau hochet pour contractualiser l'asservissement du monde agricole

 

Mais les « acteurs locaux » conviés aux petits-fours de l’Andra ont-ils envie de questionner cette terrible contre-partie du deal ? Les promesses et l’argent signifient pourtant bien peu au regard de ce qu’implique un possible feu vert pour l’installation d’un chantier titanesque, classé parmi les plus risqués du siècle.
La petite sauterie s’est terminée par la signature d’une nouvelle convention. 4,4 millions d’euros devraient permettre de financer des projets agricoles sur les 4 cantons concernés par Cigéo. Mais attention, il faudra faire du propre et du novateur, pas question d’aller salir la terre de Meuse et de Haute-marne. Vert au dessus, en apparence car la qualité des productions agricoles sera impactée, et bien crade sous terre, est-cela un avenir responsable ? 

 

Concertation bidon, à l'image du débat public sur le nucléaire

L’Andra compte avancer sans complexe et annonce vouloir concerter encore et encore : des opérations de communication qui ne trompent plus personne. La population déserte les rendez-vous organisés sous la surveillance d’escadrons de gendarmerie et qui ne répondent jamais aux questions de fond. 
Par ailleurs, le débat national en cours jusqu’au 27 février prochain sur le renouvellement du parc électronucléaire (nouveaux réacteurs dont deux premiers EPR à Penly) imposé par le gouvernement démontre ses limites. C’est ainsi que deux organisations le dénoncent (3) : « Face au passage en force d’un projet de loi d’accélération du nucléaire présenté par le gouvernement et actuellement voté au Sénat, Greenpeace France et le Réseau »Sortir du nucléaire« annoncent quitter le débat public sur l’éventuelle relance de la filière nucléaire française et le projet de construction de nouveaux réacteurs nucléaires. Les associations dénoncent une mascarade démocratique et un sabotage en règle du débat public par le gouvernement. »
Ce que corrobore aussi la CNDP dans un CP du 18 janvier : le gouvernement en tentant de revenir sur la baisse du nucléaire à 50% de la production énergétique sans attendre le débat sur le futur projet de loi de programmation énergétique considère « comme sans intérêt pour définir la stratégie énergétique les interrogations, les remarques et les propositions faites lors du débat public en cours ». 
Autrement dit, le gouvernement s’assoit sur les fondements démocratiques en matière de nucléaire. Les nouveaux EPR et Cigéo ne font pas exception.