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Communiqué du Cedra, 06/05/2022 - Les Brèves de Cigéo/Bure

Que s'est-il passé ces dernières semaines ? Entre actualités, annonces et bilans ? Toutes les infos autour de Cigéo et de la nucléarisation du territoire en Meuse/Haute-Marne ne peuvent pas faire l'objet d'un communiqué systématique. Il y aurait beaucoup trop à dire. Nous vous proposons donc régulièrement un récapitulatif des actualités et articles intéressants sur le sujet. Bonne lecture !

 

 

Cigéo/Bure, Stocamine ...

Leurs certitudes, nos craintes.
Leurs mensonges, nos territoires.
Leur arrogance, la réalité.
Un reportage à lire dans Le Monde Diplomatique ce mois-ci.

Une émission sur l’appétit foncier des industriels du nucléaire autour des centrales et de Bure !

Bien avant les annonces de Macron sur la relance du nucléaire EDF prospectait autour des centrales nucléaires pour acheter de nouveaux terrains en lien avec les SAFER (Société d'aménagement foncier et d'établissement rural). Alors que leur vocation première était de protéger la terre agricole, elles sont aujourd'hui mêlées à la prospection foncière des industriels du nucléaire.

 

 

A Bure, depuis 2007, la SAFER a joué un rôle majeur pour faciliter l'accès aux terres de l'Andra et lui a permis de se constituer un véritable empire foncier. 13 millions d'euros dépensés pour acheter jusqu'à 3000 hectares dans des villes jusqu'à 40 kilomètres de Bure.

 

Cigéo n'aurait pas besoin de ces 3000 hectares en surface : ces terres servent de monnaie d'échange pour convaincre les paysans de céder leurs terre à proximité du site.

 

Une grande partie de monopolie !

A Bure, le foncier est utilisé comme une arme : difficile de résister à la boulimie foncière de l'Andra. Et celles et ceux qui s'opposeraient à Cigéo sont identifiés via leurs terre, une façon de dissuader les paysans de s'engager.

 

Regardez ce document  interne qui détaille les parcelles agricoles et forestières concernées par le chantier, associant la parcelle et le nom assortis d'une mention maîtrisé, maitrisable, difficilement maîtrisable. Cela s'applique au contrôle du foncier, mais on identifie aussi les paysans comme prêts ou non à céder les parcelles, une sorte de fichage dont l'Andra, bien entendu, dément l'interprétation.

 

ça ne s'arrête pas là. Certains agris ont peur d'être chassés des terres qu'ils louent à l'Andra via un bail précaire, renouvelable une année sur l'autre. Si un paysan est détenteur d'une convention précaire et qu'il se montre anti Cigéo, il y a de grande chance que le bail ne soit pas renouvelé l'année d'après. Ces terres sont redistribuées aux acteurs du territoire : paysans, élus, syndicats etc : un verrouillage politique déguisé pour mieux maîtriser le territoire.
Maîtriser le territoire, c'est aussi empêcher les installations d'opposants. Récemment, l'Andra a fait jouer la SAFER dans son droit de préemption sur une vieille ferme inhabitée du village de Mandres acquise par des opposants. Cela n'a pas abouti, le tribunal a considéré que les conditions n'étaient pas réunies pour que le droit de préemption puisse être exercer. Mais cela traduit l'inquiétude de l'Andra à voir des opposant-es s'installer sur le territoire.

Les beaux jours invitent à l'organisation d'une marche printanière en direct de la voie ferrée de Cigéo !

Samedi 21 mai, le Collectif pour la Protection de la Vallée de l'Ornain organise une marche informative au départ de Ligny-en-Barrois à 14h !
Pour celles et ceux qui ne connaissent pas, l'Ornain est la petite rivière qui sillonne le sud meusien. La voie ferrée qui serait réhabilitée pour le transport des déchets radioactifs de Cigéo suit ses courbes. L'Ornain, c'est aussi un cours d'eau qui subirait les rejets de Cigéo. Impacts sur le milieu naturel, risques liés aux transports radioactifs, la Vallée de l'Ornain est directement concernée et c'est tout le propos de la marche explicative organisée !

 

Le Cedra a commémoré l'anniversaire de Tchernobyl à Chaumont

Le 26 avril, des adhérent-es du Cedra habitant dans le sud de la Haute-Marne ont organisé une commémoration du 36ème anniversaire de Tchernobyl à Chaumont. Voir article ci-dessous !
Tchernobyl, comme toute accident nucléaire, est une catastrophe sans fin. Un accident nucléaire n'est pas figé mais dure dans le temps et l'espace, ses conséquences sont difficilement chiffrables, elles se prolongent pour des siècles, s'étendent sur des milliers de kilomètres.
En Haute-Marne, Bure/Saudron concentrerait des niveaux de radioactivité comme nulle part ailleurs dans le monde, l'accumulation de plusieurs décennies de déchets radioactifs les plus dangereux. La filiation entre Tchernobyl et Bure est évidente pour nous qui redoutons l'implantation du projet Cigéo et ce sinistre anniversaire doit nous permettre de redoubler de détermination.
A l'occasion de l'anniversaire de Tchernobyl, une version courte du documentaire "Tchernobyl - les combattants oubliés" de Emilie Dietrich a été mise en ligne et relayée par la Criirad qui était intervenue. En 1986, ce sont quelques 800 000 liquidateurs qui ont été envoyés sans information sur le site pour le décontaminer. Ils n'avaient AUCUNE idée de la réalité de la situation.
En cas d'accident nucléaire aujourd'hui, en France comme ailleurs, la même cacophonie et désinformation règnerait. A qui ferions-nous confiance ? Au gouvernement qui nous demanderait de ne pas céder à la panique ou aux discours calibrés des acteurs nucléaires ?
Lire le communiqué du Réseau sortir du nucléaire "Tchernobyl : 36 ans après, la situation est plus que jamais préoccupante"

#ToutPlaquerPourVivreACotéDeCigéo

Flagrant délit de greenwashing : le département de la Meuse cherche à attirer de nouveaux habitant-es, et l'agence "Meuse attractivité" a concocté une offre clé en main "Bienvenue en Meuse" : emploi, loisirs, patrimoine et immobilier. On comprend. Mais elle est où la poubelle nucléaire ? QUI va prévenir ces nouveaux arrivants de la monstruosité du projet sans équivalent qui se prépare dans ce cadre idyllique ?
Les élu-es sont encore trop peu à ouvrir les yeux. Désertification et anxiété sont le corollaire de l'installation d'un gigantesque dépôt atomique supposé s’ancrer en Meuse/Haute-Marne. L'attractivité et le développement du territoire ne passent pas par un projet mortifère. Et il ne suffit pas de ne pas le mentionner pour le faire disparaître.
Extrait du CP : "Cigéo, comme un début de gueule de bois" à lire ici en entier : http://burestop.free.fr/spip/spip.php?article1030
Lire l'article "Venez vivre en Meuse : dix familles en immersion pendant 48 heures pour envisager de s'y installer"

L'illustration de l'expression "mettre la charrue avant les bœufs"

Ou comment organiser le contournement du village de Saudron pour Cigéo alors que le projet ne se fera peut-être jamais, et ne serait dans tous les cas pas autorisé avant plusieurs années.



 

Sortons du "piège de la climatisation du débat nucléaire"

Le mois dernier, un article de Télérama "Atomes : des centrales invulnérables ?" revenait sur plusieurs problématiques du nucléaire réveillées par l'invasion russe en Ukraine. Il faut sortir du piège de "la climatisation du débat nucléaire" : en ne parlant du nucléaire que sous l’angle climatique, notre capacité à penser l’atome dans ses différentes dimensions s’est laissée asphyxier ! Quelques enseignements et extraits intéressants :
1° : L’actualité fait ressurgir des questions que l’on pensait refoulées depuis Fukushima et réservées « aux militants anti » : "Voulons-nous vraiment d’une France et d’un monde plus radioactifs ? Souhaitons-nous, à tout prix, dépendre de l’uranium russe ? Bref, jusqu’où sommes-nous prêts à accepter l’extrême vulnérabilité à laquelle nous expose le choix du nucléaire civil comme militaire ?"
2° : Les risques de malveillance ne viennent pas que des organisations terroristes : "On sait aujourd’hui que même si le droit international interdit toute attaque ou menace d’une installation nucléaire, des chefs d’États peuvent en faire des cibles stratégiques, des forteresses assiégées"
3° : Cette guerre fait exploser les frontières supposées entre la bombe et le réacteur : "Cette division entre nucléaire civil et militaire a été construite et réussie par les promoteurs de l’énergie nucléaire : dès les années 50, la politique du président de E-U Eisenhower a consisté à séparer l’emploi du militaire de celui des « Atoms for peace », ces atomes consacrés au futur énergétique de l’humanité."
Est-ce qu'on accepte la probabilité d'un accident ? :"La filière a domestiqué le risque car elle s’inscrit dans le temps long et a besoin d’une pérennité politique. Certes, les autorités nucléaires reconnaissent que les accidents sont possibles en France mais on a assisté au film du temps à une normalisation de ceux-ci avec un cadrage structurellement rassurants". « Ces approches s’inscrivent dans une pensée d’ingénieurs, selon laquelle il serait possible d’anticiper, de modéliser et prévenir la quasi-totalité des causes d’accidents [COUCOU L'ANDRA], appuie Valérie Arnhold. Alors que l’histoire de l’énergie nucléaire montre que c’est impossible parce que nos savoirs restent limités et que les modèles des experts sont souvent élaborés dans des conditions de laboratoire, qu’on peut qualifier d’irréalistes. La centrale nucléaire y est pensée comme un système autonome qui fonctionnerait dans des conditions environnementales stables, avec des agents d’exploitation en capacité de suivre les procédures d’exploitation à la lettre. Ce qui est en décalage avec les nombreux phénomènes auxquels est confronté le secteur nucléaire : une situation de guerre, le vieillissement des centrales, ou encore le changement climatique, qui bouleverse les conditions météorologies et environnementales dans lesquelles les réacteurs sont censés être exploités."
5° : De quelle indépendance énergétique parle-t-on au juste en matière nucléaire ? La France n'exploite plus de mine d'uranium sur son sol depuis 2001, extrait l'uranium dans des pays comme le Kazakhstan sous influence russe, EDF renforce sa collaboration avec Rosatom, EDF est toujours sous contrat avec la Sibérie pour enrichir son uranium.. : "Qu’on parle des exportations de réacteurs ou des besoins en combustibles, la France est coincée par ses coopérations avec le nucléaire russe et chinois."

 

 

L'argile de Bure est bien un facteur de risque supplémentaire pour la sûreté de Cigéo

Le reportage d'Arte diffusé le 29 mars fut EXPLOSIF pour Cigéo ! Et les réponses de l'Andra ne satisfont pas du tout. 🙄
Deux enseignements :
❌  L’argile de Bure est bien un facteur d'incendie supplémentaire. En effet, l'Andra ne nie pas le phénomène qui se produit. Elle considère juste que l'expérience n'est pas transposable à Cigéo... Ce n'est pas l'avis de Bertrand Thuillier ou de Marcos Buser également interviewé dans le reportage.
❌  À quoi sert Cigéo si les déchets bitumés (hautement inflammables) ne peuvent pas être enfouis alors qu'ils représentent presque 1/5ème des déchets ? L'Andra répond simplement qu'ils ne seront pas enfouis en premier alors que l’IRSN dans le reportage estime qu'on ne doit pas enfouir des déchets inflammables....
Bref : risque d'incendie avéré + déchets trop inflammables pour être enfouis = abandon de Cigéo. Car en réalité, c’est toute la stratégie de sécurité de Cigéo par rapport au risque d’incendie qui est remise en cause !
Nous reviendrons bientôt là-dessus !
Lire l'article de France 3 : https://france3-regions.francetvinfo.fr/grand-est/meuse/bar-le-duc/meuse-un-documentaire-d-arte-evoque-un-risque-en-cas-d-incendie-generalise-lie-au-sous-sol-argileux-de-bure-2515236.html?fbclid=IwAR379DVn4owyL8K8Rnon6rraPFJYwf4MXaGV0befHF5jI_EKQf4Wsw8BHYw

 

Atlantique, sur la piste des déchets radioactifs

Un article intéressant du CNRS sur les immersions des déchets radioactifs en pleine mer dans les années 1950 à 1990 durant lesquelles 200 000 fûts ont été jetés par les États européens. Aujourd'hui, les scientifiques n’ont aucune idée de la radioactivité résiduelle de ces immersions... 
Pour rassembler ces données, une mission scientifique est organisée et se déroulera en deux temps en 2023 et en 2024 : la première pour aller cartographier les fonds marins et localiser les futs qui se trouvent sur deux zones de 6000 km² à 600 kms des côtes françaises tandis que la seconde campagne se concentrera sur les radionucléides présents et sur leur impact sur les écosystèmes...

 

 

 

 

Nucléaire civil et militaire sont indissociables

Un réacteur nucléaire n'est pas une bombe atomique mais en période de conflit et d'instabilité politique il peut en devenir une. Avec la guerre, le mythe du nucléaire civil comme instrument de paix développé par l'AIEA s'effondre. Avec la guerre, le nucléaire civil n'existe pas.
Dans son article "Réacteurs en zone de guerre", Rodney Ewing, professeur en sûreté nucléaire rappelle que "un réacteur nucléaire contient un stock de produits de fission radioactifs bien supérieur à celui que produit une arme comme la bombe A d'Hiroshima". Libérer les combustibles hautement radioactifs d'un réacteur équivaut à créer une bombe environnementale. "Le plutonium et l'uranium irradiés stockés dans les piscines des centrales nucléaires après avoir été utilisés dans les réacteurs constituent un danger immédiat pour les personnes et une menace de très longue durée pour l'environnement nécessitant des zones d'exclusion à l'échelle de milliers de kilomètres². A distance d'un mètre, une personne exposée à des combustibles nucléaires usagés recevra une dose létale en moins d'une minute.

 

Lire l'article de Reporterre du 26/03/2022 : "La guerre en Ukraine enterre le mythe du nucléaire civil"