Dans une ambiance petits fours et pétillant, l’assemblée des entrepreneurs et industriels locaux, réunie début décembre 2021 lors de leur opération annuelle "Achetons local", s’est une fois de plus laissée séduire par le dangereux mirage Cigéo. L’Andra a joué l’esbroufe et les paillettes alors que l’avenir du projet n'est pas si simple.
Baratin et vaines promesses
Le double directeur du Centre de Stockage de l'Aube (CSA) et du Centre Meuse Haute-Marne (CMHM) annonçait sa nomination –une de plus- à la tête d’une nébuleuse "Direction industrielle et
Grand-Est". Mais où s’arrêtera Patrice Torres, commercial de formation, tombé en amour pour le nucléaire et artisan acharné d’un Cigéo à marche forcée ?
De sa hotte garnie d’illusions, il tirait quelques maigres nouvelles et en vrac : création d’une base de vie pour héberger l'escadron basé au laboratoire de Bure, programme de fouilles
archéologiques à partir de 2023, ou encore clauses sociales pour favoriser le retour à l’emploi…
Côté échéances, Patrice Torres a joué la rassurance brouillonne. En attente des conclusions de l’enquête publique, l’Andra aurait remis un mémoire en réponse. Mais à quoi ? Aux multiples
remises en questions soulevée par l’Ae (1) en début d’année, ou à une commission d’enquête qui ne serait pas emballée par Cigéo ? Nous le saurons bientôt. Selon lui, la DUP, en cours
d’instruction, permettrait d’effectuer des acquisitions foncières par voie d’expropriation pour lancer les premiers travaux. Et un « dossier minute » de demande d’autorisation de création
(DAC) serait en cours de finalisation pour dépôt en 2022.
Derrière l'aveuglement soigneusement entretenu par l'Andra, une autre réalité
Un dossier « minute » ? Il y a de quoi frémir vu l'indigence de l'étude d'impact globale, les risques technologiques vertigineux reconnus, et l'ampleur des incertitudes qui caractérisent le
projet de stockage géologique à Bure.
Les espoirs d'Antoine Leconte, président d'Energic ST 52/55, qui se félicite de l'avancée du projet Cigéo : "les travaux préparatoires sont pour demain, la construction
pour après-demain et "l'énergie nucléaire qui redevient tendance" risquent bien d’être douchés.
Jeudi 9 décembre 2021 L'Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) a reconnu à la 33ème conférence des CLI (Comité local d'information) que "le projet
Cigéo interroge notamment sur des questions complexes liées aux risques d'incendie" qui ne sont pas encore résolues. Et l'avenir de la filière est criblé d'incertitudes
(2).
Bref, pour les premiers coups de pioche, il va falloir attendre encore un peu et les efforts gesticulatoires de l’Andra ne suffiront pas à rassurer le milieu du BTP qui trépigne
d'impatience. La magie de Noël n'y changera rien ! Cigéo accumule les retards, le calendrier ne cesse d'être modifié. Le dépôt du dossier de demande d'autorisation de création
prévu en 2019 avec décret d'autorisation en 2022 s'est vu actualiser, pour être repoussé à 2025 à présent. (3)
L’avenir du territoire ne passera pas par un nucléaire mortifère et dépassé, et des escadrons de gendarmes, mais bien par une
réappropriation de nos choix d’avenir et une interrogation collective du sens de ce projet : “achetons local”. Cigéo, un cadeau local ?
Certainement pas.
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2 - La Cour des Comptes met en doute notre capacité à construire un nouveau parc nucléaire dans des délais et coûts raisonnables, notamment car
"le maintien d'une part nucléaire de 50% dans la production d'électricité au-delà de 2050 supposerait de disposer à terme non pas de 7 EPR ou EPR3 mais de 25 à 30 dans
l'hypothèse où les réacteurs actuels seraient presque tous arrêtés à cet horizon" (lire la note : https://reporterre.net/IMG/ pdf/20211118-ns-production- electricite.pdf)
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