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Derrière le dépôt de la demande de DUP de Cigéo, de nouvelles contestations et le réveil de celles qui sommeillaient

Alors que la demande de DUP de l'ANDRA semblait avoir été déposée dans la presque indifférence générale, elle a en réalité ravivé certaines inquiétudes que l'ANDRA voudrait au maximum invisibiliser. C'est ce que révèle une dépêche AFP du 9/10/20 : https://www.connaissancedesenergies.org/afp/bure-dechets-nucleaires-demande-dutilite-publique-et-risques-dexpropriations-201009

A l'heure où Cigéo revêt soudainement une allure plus concrète, les voix se libèrent... même si elles sont teintées de mauvaise foi.

Cet article dépeint "la douche froide" ressentie par les habitants et en particulier par les élus locaux et les propriétaires fonciers suite à cette annonce. Le maire de Bure proteste, n'ayant pas été informé de ce dépôt. Il rumine contre l'ANDRA qui abandonne les élus locaux. Il peste : "Aujourd'hui, si on interrogeait le conseil municipal, on voterait tous contre. On nous a roulés dans la farine", dit-il. C'est vrai, en 1997 le conseil municipal avait voté pour le laboratoire, mais il n'avait pas voté pour un stockage définitif. La population et les élus n'ont finalement jamais été consultés sur l'acceptation du projet et en particulier sur le glissement du laboratoire actuel vers un centre de stockage géologique. Nuance ! Transformation du laboratoire en site d'enfouissement définitif, expropriations à venir.. ces menaces, nous les dénoncions déjà avant qu'elles ne deviennent réalité. Ces mensonges du présent laissent mal augurer des vérités du futur, il y a bien d'autres points sur lesquels l'ANDRA affabule : phase-pilote du site, réversibilité durant un fonctionnement normal ou en cas d'accident, développement de l'attractivité du territoire... Si certains élus locaux commencent à ouvrir les yeux, il va falloir les garder grand ouvert désormais et arrêter de regarder ailleurs comme ils le font depuis 20 ans. Naïveté ou cupidité ? Il est évident que les élus locaux ont eu la vue obstruée par l'impressionnante manne financière promise en échange du laboratoire - dont qu'ils ont bien profité.

 

Pour autant, derrière la communication pompeuse de l'Andra et ses concertations où elle vante l'association des acteurs locaux, les élus du coin font entendre progressivement une voix dissonante : les relations entre l'agence et les acteurs du territoire se sont détériorées.

Les négociations "à l'amiable" n'auront pas suffi : malgré un harcèlement à peine voilé, certains résistent.

Fin des paysans, expropriations à venir, départ d'immenses travaux préparatoires liés au projet Cigéo et aux importantes infrastructures qu'il nécessiterait... L'intérêt général du projet serait déclaré au détriment d'un territoire et en particulier de ses habitants, qu'ils soient des opposants acharnés de la première heure, des élus locaux que l'ANDRA a su rendre dociles, ou qu'ils fassent partie de la population disciplinée jusqu'alors par les promesses de l'Andra.

 

C'est un échec pour l'ANDRA : entre habitants récalcitrants et tensions réveillées par l'annonce du dépôt de la demande de DUP, l'ANDRA n'aura pas réussi à acquérir tout le foncier dont elle a besoin malgré des procédures amiables pour acquérir terres agricoles et forêts, des échanges de terres et la réserve foncière qu'elle s'est constituée avec la complicité des SAFER de la Lorraine et de la Champagne-Ardenne. Il y a longtemps que les SAFER, par le biais "d'accords privés" les liant à l'ANDRA ne facilitent plus l'implantation des agriculteurs dans le secteur mais accentuent l'exil des paysans. Achats massifs en Meuse/Haute-Marne (et plus loin encore) complètement disproportionnés face à l'emprise du projet, gonflement des prix des terres agricoles, détournement de l'objectif de la SAFER, harcèlement des propriétaires et des agriculteurs ne seront avérés insuffisants. Si l'ANDRA a acquis un empire qui fait d'elle un des propriétaires terriens les plus importants du territoire, il lui manque des parcelles probablement plus ou moins stratégiques.

Après la fourberie des négociations, la violence de l'expropriation ?

Au nom d'un projet qui n'est pas autorisé et dont les risques liés à la sûreté nucléaire sont confirmés au plus haut niveau des instances en charge de son évaluation, la population est invitée à quitter ses terres et son histoire. Voilà ce qui se cache derrière l'utilité publique ! Nous glissons d'une expropriation déguisée vers une expropriation institutionnalisée. Mais cette procédure pourrait bien venir renflouer les rangs de la résistance à la poubelle nucléaire. Si l'ANDRA n'a pas annoncé en grandes pompes le dépôt de la demande de DUP, c'était pour mieux éviter un surcroît de mobilisation contre le projet. Un sursaut qu'elle a elle-même favorisé....