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Contrôles judiciaires contre les opposant.e.s : une atteinte grave aux libertés fondamentales

 

 

Le 14 novembre 2018, la Cour de Cassation examinera le recours formulé par cinq opposant.e.s au projet Cigéo contre leur scandaleux placement sous contrôle judiciaire. Celui-ci fait suite à une mise en examen pour "association de malfaiteurs" en juin 2018.

 

Nous dénonçons ici un dispositif contraire aux libertés fondamentales, qui vise à paralyser tout un mouvement de lutte, celui d’opposition à un mégalomaniaque projet de l’industrie nucléaire, dont les travaux menacent de commencer à tout moment.

 

 

Le 20 juin 2018, une vague de répression inédite en 25 ans s’est abattue sur le mouvement d’opposition au projet Cigéo d’enfouissement de déchets radioactifs à Bure. Ce jour-là, au motif d’une information judiciaire ouverte en juillet 2017 par le juge d’instruction de Bar-le-Duc Kevin le Fur, pour "association de malfaiteurs", quatorze lieux ont été perquisitionnés, des dizaines d’ordinateurs et téléphones saisis, et neuf personnes ont été brutalement arrêtées. Elles ont subi entre 48 et 60 heures de garde à vue. Début septembre et octobre, deux autres personnes ont été arrêtées dans des conditions tout aussi brutales. La diversité des personnes concernées reflète celle de la lutte contre Cigéo : opposante depuis plus de 20 ans à la poubelle nucléaire, personnes récemment installées à Bure et dans les environs, militant.e.s associatif.ve.s, et même un des avocats du mouvement.

 

Au total, parmi elles, 7 personnes ont été mise en examen pour "association de malfaiteurs" et placées sous contrôle judiciaire. Pendant plusieurs années que durera l’enquête d’instruction, elles n’auront plus le droit "d’entrer en relation" entre elles et avec les trois autres personnes mises en cause : plus le droit de se parler, de se voir, de se toucher, de se trouver dans la même pièce ou sur le même trottoir. Elles sont interdites de Bure, Mandres, parfois de plusieurs villages ou même de l’ensemble de la Meuse et/ou de la Haute-Marne ; et dans certains cas de sortie du territoire national. Ce sont donc 10 personnes investies dans cette lutte qui voient leur vie sociale impactée et une partie de leurs amitiés interdites. Passer des soirées ensemble, participer à un événement, ou même se rendre à l’enterrement d’un ami commun : autant de moments auxquels elles doivent renoncer par peur de se croiser.

 

Nos organisations dénoncent une mesure qui, outre ses conséquences délétères sur la vie privée et affective des personnes, constitue une atteinte très grave à la liberté d’association, reconnue comme un droit fondamental dans l’article 20 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Une grande partie d’entre elles sont impliquées dans les mêmes structures, qu’il s’agisse de collectifs, associations de fait, ou d’associations de loi 1901. En suivant cette mesure absurde, il leur faut maintenant s’auto-exclure d’échanges et de groupes de travail qui leur tenaient à coeur pour éviter d’entrer en contact.

 

Du fait de ces mesures injustes et perverses, le fonctionnement interne de nos associations et collectifs se voit lourdement entravé. L’organisation des échanges, tout comme la tenue de réunions, relèvent maintenant du casse-tête. Deux administratrices du Conseil d’Administration du Réseau "Sortir du nucléaire" ne peuvent plus se parler sans prendre le risque de la détention préventive : comment tenir des réunions dans ces conditions ? La même paralysie plane sur les réunions de la Coordination Stop Cigéo, de nombreux autres groupes de travail, juridique notamment, et de toute forme d’organisation collective dans les assemblées de lutte et les réunions des différentes composantes. En interdisant à 10 personnes de se voir, c’est sur l’ensemble du mouvement que pèse cette chape de plomb, cette menace d’être le ou la prochaine à subir le même sort.

 

Nous ne sommes pas dupes : cette répression consternante est directement proportionnelle aux failles du projet. Cigéo est fragilisé sur le plan technique, sa sûreté ayant été remise en question par l'ASN début 2018, et infaisable sur le plan économique, au vu du manque crucial de provisions. Alors qu’il n’y a jamais eu autant de raisons légitimes de s’y opposer, ces contrôles judiciaires sont utilisés pour tenter de paralyser la lutte, isoler, discréditer les personnes et provoquer un sentiment d’impuissance. Cette stratégie d’asphyxie et de criminalisation s’apparente à une tentative de l’État de balayer toute opposition aux travaux actuels de l’Andra sur le terrain, celle-ci souhaitant déposer au plus vite la Demande d’Autorisation de Création mi-2019.

 

Lutter contre cette criminalisation c’est directement lutter contre CIGEO. Nous soutenons la démarche des personnes qui contestent ce contrôle judiciaire. Après un refus en appel le 22 août 2018, la Cour de cassation doit se pencher sur leur cas le mercredi 14 novembre. Nous appelons à mettre fin à ces mesures absurdes et liberticides.

 

L'audience aura lieu à 9h45 en présence de mis.e.s en examen et sera suivie d'une prise de parole lors d'un point presse devant la Cour à 10h30.

 

 

 

 

Contact presse :

Angélique Huguin (pour le Réseau "Sortir du nucléaire") - 06 88 27 16 06
Juliette Geoffroy (pour le CEDRA) - 06 50 69 72 61

Chargée de communication :

Charlotte Mijeon - 06 64 66 01 23